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l’entendement humain

continué de dormir, si elle avait été seule, et cela sans se souvenir d’avoir été appelé. Ainsi il y a des perceptions trop faibles pour être remarquées, quoiqu’elles soient toujours retenues, mais parmi un tas d’une infinité d’autres petites perceptions que nous avons continuellement. Car ni mouvements ni perceptions ne se perdent jamais ; l’un et l’autre continuent toujours, devenant seulement indistinguables par la composition avec beaucoup d’autres. On pourrait répondre à ce raisonnement qu’effectivement chaque voix à part touche le corps, mais qu’il en faut une certaine quantité pour que le mouvement du corps aille a l’âme. Je réponds que la moindre impression va à tout corps, et par conséquent à celui dont les mouvements répondent aux actions de l’âme. Et après cela, on ne saurait trouver aucun principe de limitation pour qu’il faille une certaine quantité. Je ne veux point insister sur l’intérêt que l’immortalité de l’âme a dans cette doctrine. Car, si l’âme est sans opération, elle est autant que sans vie, et il semble qu’elle ne peut être immortelle que par grâce et par miracle : sentiment qu’on a raison de désapprouver. J’avoue cependant que notre intérêt n’est pas la règle de la vérité, et je ne veux point mêler ici les raisons théologiques avec celles de la philosophie.