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nouveaux essais sur l’entendement

serait convenable qu’en comptant, au lieu de million de millions, on dise billion pour abréger, et qu’au lieu de million de millions de millions, ou millions de billions, on dise trillion, et ainsi de suite jusqu’aux nonillions, car on n’a guère besoin d’aller plus loin dans l’usage des nombres.

Th. Ces dénominations sont assez bonnes. Soit X égal à 10. Cela posé, un million sera X6, un billion X12, un trillion X12, etc., et un nonillion X54.

Chap. XVII. — De l’infinité.

§ 4. Ph. Une notion des plus importantes est celle du fini et de l’infini, qui sont regardes comme des modes de la quantité.

Th. À proprement parler, il est vrai qu’il y a une infinité de choses, c’est-à-dire qu’il y en a toujours plus qu’on n’en puisse assigner. Mais il n’y a point de nombre infini ni de ligne ou autre quantité infinie, si on les prend pour des véritables touts, comme il est aisé de démontrer. Les écoles ont voulu ou dû dire cela en admettant un infini syncatégorématique, comme elles parlent, et non pas l’infini catégorématique. Le vrai infini, à la rigueur, n’est que dans l’absolu, qui est antérieur à toute composition et n’est point formé par l’addition des parties.

Ph. Lorsque nous appliquons notre idée de l’infini au premier Être, nous le faisons originairement par rapport à sa durée et à son ubiquité, et plus figurément à l’égard de sa puissance, de sa sagesse, de sa bonté et de ses autres attributs.

Th. Non pas plus figurément, mais moins immédiatement, parce que les autres attributs font connaître leur grandeur par le rapport à ceux où entre la considération des parties.

§ 2. Ph. Je pensais qu’il était établi que l’esprit regarde le fini et l’infini comme des modifications de l’étendue et de la durée.

Th. Je ne trouve pas qu’on ait établi cela ; la considération du fini et de l’infini a lieu partout où il y a de la grandeur et de la multitude. Et l’infini véritable n’est pas une modification, c’est l’absolu ; au contraire, dès qu’on modifie, on se borne, on forme un fini.

§ 1. Ph. Nous avons cru que la puissance qu’a l’esprit d’étendre