Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
107
des idées

plus d’une fois si sa folie n’était pas une feinte, car il ne s’en trouve pas mal. Cependant ceux qui le connaissent plus particulièrement m’assurent que c’est tout de bon.

Chap. XII. — Des idées complexes.

Ph. L’entendement ne ressemble pas mal à un cabinet entièrement obscur, qui n’aurait que quelques petites ouvertures pour laisser entrer par dehors les images extérieures et visibles, de sorte que, si ces images, venant à se peindre dans ce cabinet obscur, pouvaient y rester et y être placées en ordre, en sorte qu’on pût les trouver dans l’occasion, il y aurait une grande ressemblance entre ce cabinet et l’entendement humain.

Th. Pour rendre la ressemblance plus grande, il faudrait supposer que dans la chambre obscure, il y eût une toile pour recevoir les espèces, qui ne fût pas unie, mais diversifiée par des plis, représentant les connaissances innées ; que, de plus, cette toile ou membrane étant tendue, eût une manière de ressort ou force d’agir, et même une action ou réaction accommodée tant aux plis passés qu’aux nouveaux venus des impressions des espèces. Et cette action consisterait en certaines vibrations ou oscillations, telles qu’on voit dans une corde tendue quand on la touche, de sorte qu’elle rendrait une manière de son musical. Car non seulement nous recevons des images ou traces dans le cerveau, mais nous en formons encore de nouvelles, quand nous envisageons des idées complexes. Ainsi il faut que la toile, qui représente notre cerveau, soit active et élastique. Cette comparaison expliquerait tolérablement ce qui se passe dans le cerveau ; mais, quant à l’âme, qui est une substance simple ou monade, elle représente sans étendue ces mêmes variétés des masses étendues et en a la perception.

§ 3. Ph. Or les idées complexes sont ou des modes, ou des substances, ou des relations.

Th. Cette division des objets de nos pensées en substances, modes et relations est assez à mon gré. Je crois que les qualités ne sont que des modifications des substances, et l’entendement y ajoute les relations. Il s’ensuit plus qu’on ne pense.

Ph. Les modes sont ou simples (comme une douzaine, une ving-