Page:Œuvres morales de Plutarque, traduites du grec par Amyot, tome 3, 1802.djvu/30

Cette page n’a pas encore été corrigée

estre que par l'honneur qu'ils s'entre-portent, l'un veut sembler avoir plus d'affection et plus d'amour envers ce qui est plus propre à l'autre : toutefois cela à l'adventure est different, mais bien est-il seant et honneste à la femme, de monstrer avoir plus d'inclination à honorer et caresser les parents de son mary, que les siens propres : et si elle a quelque ennuy, le communiquer plus tost à ceux- là, et le celer aux siens : car ce qu'elle monstre avoir plus de fiance en eux, fait qu'ils se fient plus en elle : et ce qu'il semble qu'elle les aime plus, fait qu'elle est aussi plus aimee d'eux.

Les Capitaines de Cyrus commanderent à leurs soudarts, si les ennemis leur venoient courir sus avec grands cris, qu'ils les receussent sans mot dire : et au contraire, s'ils venoient les assaillir en silence, qu'eux leur courussent avec grands cris à l'encontre : aussi les femmes de bon entendement, quand elles voyent que leurs marits estans en cholere crient, elles se taisent : et au contraire, s'ils ne disent mot, en parlant à eux et les reconfortant, elles les appaisent et addoulcissent. Et fait sagement le poëte Euripides, quand il reprend ceux qui usent de la Lyre, et autres instruments de musique durant un festin : «Car il falloit, dit-il, plus tost appeller la musique quand on est en cholere, ou bien en dueil, que non pas quand on est en feste et en joye, pour se lascher encore plus en toute volupté :» Aussi faut-il estimer que vous commettez une faute, quand vous allez coucher ensemble pour vous donner plaisir l'un à l'autre,