Page:Œuvres morales de Plutarque, traduites du grec par Amyot, tome 3, 1802.djvu/28

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dominer sa femme, en luy complaisant et la gratifiant.

Les Philosophes tiennent, que des corps composez de plusieurs pieces, les uns sont composez de parties distinctes et separees les unes des autres, comme une flotte de vaisseaux, ou une armee navale : les autres de parties conjoinctes et qui touchent les unes aux autres, comme une maison ou une navire : les autres de parties unies dés la naisance, croissantes et vivantes naturellement ensemble, comme sont tous les corps des animaux. Le mariage se rapporte presque et ressemble à tout cela : car le mariage de ceux qui s'entre-aiment, ressemble proprement aux corps dont les parties sont naturellement unies ensemble : celuy de ceux qui se marient pour les grands douaires, ou pour avoir des enfans, ressemble aux corps dont les parties s'entretouchent : et celuy de ceux qui couchent seulement ensemble, se conforme au corps duquel les parties sont separees et distinctes l'une de l'autre, desquels on pourroit veritablement dire, qu'ils habitent, mais qu'ils ne vivent pas ensemble. Or fault-il, que comme les Physiciens disent, que les corps liquides sont ceux qui se meslent du tout en tout l'un avec l'autre, aussi que de ceux qui sont mariez ensemble, et les corps et les biens, et les amis, et les parents soient tous uns et communs, meslez l'un parmy l'autre : c'est pourquoy les loix Romaines defendent aux conjoincts par mariage de s'entrefaire donations mutuelles, non à fin qu'ils n'aient rien l'un de l'autre, mais à celle