Page:Œuvres morales de Plutarque, traduites du grec par Amyot, tome 3, 1802.djvu/23

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Une autre fois la mesme Royne Olympias entendant qu'un jeune gentilhomme espousoit une Dame de la court, qui estoit bien belle, mais elle n'avoit pas trop bon bruit : «Cestui-cy, dit-elle, n'a point de cervelle, car autrement il ne se fust pas marié au rapport ny à l'appetit de ses yeux.» Or ne se fault-il pas marier au gré de ses yeux seulement, ny au rapport de ses doigts non plus, comme font aucuns qui comptent sur leurs doigts, combien leur femme leur apporte en mariage, et ne considerent pas premierement, si elle est conditionnee de sorte qu'ils puissent vivre avec elle.

Socrates avoir accoustumé de conseiller aux jeunes hommes qui se regardoient dedans des miroirs, s'ils estoient laids de visage, de corriger leur laideur par la vertu, en se rendant vertueux : et s'ils estoient beaux, de ne souiller point leur beauté par vice : aussi seroit-il bien honneste que la Dame mariee, quand elle tient son miroir en sa main, parlast ainsi en elle-mesme, si elle est laide : Que sera-ce au pris, si je demeure honneste et sage ? car si la laide est aimee pour sa bonne grace, et pour ses honnestes moeurs, ce luy est plus d'honneur, que si c'estoit pour beauté.

Le tyran de Sicile Dionysius envoyoit des robbes et des bagues precieuses aux

filles de Lysander, mais Lysander ne les voulut oncques recevoir, disant, «Ces presens feroient plus de honte que