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ceux qui les pouvoient faire ; et Curius, si fort honoré pour sa vertu desintéressée, le fut encore davantage, quand il leur fit voir, dans son triomphe, de l’or, de l’argent, des tableaux et des statues : on connut alors qu’il y avoit des choses plus excellentes ailleurs qu’en Italie.

Ainsi, des idées nouvelles firent, pour ainsi parler, de nouveaux esprits ; et le peuple romain, touché d’une magnificence inconnue, perdit ses vieux sentiments, où l’habitude de la pauvreté n’avoit pas moins de part que la vertu.

La curiosité éveilla donc les citoyens ; les cœurs même commencèrent à sentir, avec émotion, ce que les yeux avoient commencé de voir, avec plaisir ; et, quand ces mouvements se furent mieux expliqués, on fit paroître de véritables désirs pour les choses étrangères. Quelques particuliers conservèrent encore l’ancienne continence, comme il est arrivé depuis, et dans le temps de la république la plus corrompue ; mais enfin, il se forma une envie générale de passer la mer, pour s’établir en des lieux où Pyrrhus avoit su trouver tant de richesses. Voilà proprement d’où est venue la première guerre de Carthage ; le secours donné aux Tarentins en fut le prétexte : la conquête de la Sicile, le véritable sujet.

Après avoir dit par quels mouvements les