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ce qu’il auroit voulu fortement ; mais, pour avoir pris le parti de la persuasion, et avoir laissé prendre à don Luis celui de l’autorité, les Espagnols ont fait la paix, comme s’ils avoient été en notre place, et nous avons reçu les conditions, comme si nous avions été en la leur. Je sus de quelqu’un d’eux que M. de Lionne leur eût été d’une humeur fort épineuse, si son supérieur n’eut levé tous les obstacles qui traversoient la conclusion14.

Cette grande facilité m’a fait faire réflexion sur le différent procédé des deux ministres ; et j’ai trouvé qu’aux affaires particulières, M. le cardinal étoit plein de difficultés, de dissimulations, d’artifices, avec ses meilleurs amis ; dans les traités publics, avec nos ennemis même, confiant, sincère, homme de parole, comme s’il eût voulu se justifier aux étrangers de la réputation où il étoit parmi nous, et rejeter les vices de son naturel sur les défauts



14. Le marquis de Lionne et don Antonio Pimentel, ébauchèrent le traité des Pyrénées : l’un pour le cardinal Mazarin, et l’autre pour don Louis de Haro. Ils eurent des conférences à Paris, avant l’entrevue des deux ministres ; et pendant la conclusion du traité, ils concertoient entre eux les choses que Mazarin et don Louis devoient déterminer. M. de Saint-Évremond veut dire que M. de Lionne étoit rigide et bon François ; mais que Mazarin, entêté de conclure la paix, relâchoit ce que Lionne vouloit qu’on obtînt. (Id.)