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Saint-Évremond examine : 1º la maxime qu’on ne doit jamais manquer à ses amis ;

2º Cette autre maxime, que l’homme qui veut connoître toutes choses ne se connoît pas lui-même ;

3º Et enfin une maxime qui couroit, savoir : qu’il faut mépriser la fortune, et ne se point soucier de la cour.

Elles circuloient encore en manuscrit, dans les salons de Paris, comme celles de La Rochefoucauld et de l’académicien Jacques Esprit, lorsque Saint-Évremond fut obligé brusquement de prendre le chemin de l’exil en 1661. Barbin les recueillit en 1668, à l’insu de l’auteur, en un volume in-12, où il réunit quelques autres opuscules, mais sans oser les imprimer avec le nom de Saint-Évremond. Les bibliophiles ont pu voir ce rarissime volume, dont j’ai découvert et feuilleté jadis le seul exemplaire connu2. Les trois maximes y sont reproduites, mais avec beaucoup d’altérations, qui furent un sujet de chagrin pour le noble exilé ; et Barbin, qui savoit sans doute que ces pages avoient été écrites pour le salon de Mme de Sablé, les fit précéder d’une dédicace à la marquise, dans laquelle il lui disoit que son suffrage étoit le moyen le plus infaillible pour avoir la voix publique. Et il ajoutoit : « Je me sers de ce moyen, Madame, pour élever la gloire d’un auteur inconnu ; il avouera peut-être son ouvrage, quand il saura que vous l’avez approuvé. Cependant, le hasard m’ayant rendu maître de son bien, je prends la liberté d’en disposer, sans son aveu. »



2. Voy. Brunet, Manuel, vº Saint-Évremond.