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me dira-t-on ? Vous ne croyez ni ses amis, ni ses ennemis : ni ses adversaires, ni ses partisans ; quel peut être le jugement que vous en faites ? Je pense qu’Épicure étoit un philosophe fort sage, qui, selon les temps et les occasions, aimoit la volupté en repos, ou la volupté en mouvement ; et de cette différence de volupté, est venue celle de la réputation qu’il a eue. Timocrate, et ses autres ennemis, l’ont attaqué par les plaisirs sensuels : ceux qui l’ont défendu, n’ont parlé que de sa volupté spirituelle. Quand les premiers l’ont accusé de la dépense qu’il faisoit à ses repas, je me persuade que l’accusation étoit bien fondée : quand les autres ont fait valoir ce petit morceau de fromage qu’il demandoit, pour faire meilleure chère que de coutume, je crois qu’ils ne manquoient pas de raison. Lorsqu’on dit qu’il philosophoit avec Leontium, on dit vrai : lorsqu’on soutient qu’il se divertissoit avec elle, on ne ment pas. Il y a temps de rire, et temps de pleurer, selon Salomon : temps d’être sobre, et temps d’être sensuel, selon Épicure. Outre cela, un homme voluptueux l’est-il également toute sa vie ? Dans la religion, le plus libertin devient quelquefois le plus dévot ; dans l’étude de la sagesse, le plus indulgent aux plaisirs se rend quelquefois le plus austère. Pour moi, je regarde Épicure autrement, dans la jeu-