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pensent avoir éteint de vieilles ardeurs, qui cherchent secrètement à se rallumer ; et leur amour, n’ayant fait que changer d’objet, elles gardent, pour leurs dernières souffrances, les mêmes soupirs et les mêmes larmes, qui ont exprimé leurs vieux tourments. Elles n’ont rien perdu des premiers troubles du cœur amoureux : des craintes, des saisissements, des transports ; elles n’ont rien perdu de ses plus chers mouvements : des tendres désirs, des tristesses délicates et des langueurs précieuses. Quand elles étoient jeunes, elles sacrifioient des amants : n’en ayant plus à sacrifier, elles se sacrifient elles-mêmes ; la nouvelle convertie fait un sacrifice à Dieu de l’ancienne voluptueuse.

J’en ai connu qui faisoient entrer, dans leur conversion, le plaisir du changement : j’en ai connu qui, se dévouant à Dieu, goûtoient une joie malicieuse, de l’infidélité qu’elles pensoient faire aux hommes.

Il y en a qui renoncent au monde, par un esprit de vengeance, contre le monde qui les a quittées : il y en a qui mêlent à ce détachement leur vanité naturelle ; et la même gloire qui leur a fait quitter des courtisans pour le prince, les flatte secrètement de savoir mépriser le prince pour Dieu.

Pour quelques-unes, Dieu est un nouvel