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tu fais, par l’ostentation d’un pouvoir que tu n’eus jamais ? Tu avois ordonné à nos démons de nous laisser en repos, et ils n’ont fait que nous tourmenter encore davantage. Tu leur avois commandé de sortir, et ils s’opiniâtrent à demeurer, en dépit de tes ordres, se moquant également de notre crédulité et de ton imbécile puissance. » Le mari continua les mêmes reproches, avec les mêmes mépris, jusqu’à lui refuser le nom d’imposteur, parce qu’il falloit de l’esprit, disoit-il, pour l’imposture, et que ce misérable n’en avoit point.

Le prophète perdit la parole, en perdant l’autorité qui le rendoit vénérable ; et ce redoutable pouvoir, établi dans un assujettissement superstitieux des esprits, devint à rien, aussitôt qu’il y eut des gens assez hardis pour ne le pas reconnoître. Alors, l’Irlandois surpris, étonné, sortit promptement, par la porte de derrière ; moins confus toutefois, moins mortifié que le peuple : n’y ayant rien que l’esprit humain reçoive, avec tant de plaisir, que l’opinion des choses merveilleuses, ni qu’il laisse avec plus de peine et de regret. Pour M. d’Aubigny, il mit bientôt le prophète au rang de cent autres qu’il avoit essayés inutilement.

Tout le monde se retira honteux de s’être laissé abuser de la sorte, et chagrin néanmoins