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avec les personnes qui n’en ont point. Vous pouvez juger qu’elle ne demeura pas longtemps dans un logis, où l’on ne parloit que de démons, et où l’on ne faisoit rien qui ne fût de la dernière extravagance.

Le mari passa le reste du jour, et toute la nuit, dans sa chambre, honteux de la joie qu’il avoit eue, chagrin du présent, et livré à de fâcheuses imaginations, pour l’avenir. Comme l’agitation de la femme avoit été beaucoup plus grande, elle dura moins aussi ; et, revenue assez tôt à son bon sens, elle fit de tristes réflexions sur la perte des douceurs dont elle se voyoit privée.

Certaine nature d’esprit laissoit écouler peu de moments, sans demander raison à celui de discorde, de la ruine de ses intérêts et de ses plaisirs. Cet esprit, qui règne plus encore chez les femmes, et particulièrement les nuits qu’elles passent sans dormir, prévalut sur toutes choses ; en sorte que la bonne épouse, rendue purement à la nature, alla trouver son époux, dès qu’il fut jour, pour rejeter tous les désordres passés sur une puissance étrangère, qui n’avoit rien de naturel ni d’humain. « Je connois, disoit-elle, dans le bon intervalle où je suis présentement, que nos esprits ne se sont point rendus au commandement de l’Irlandois ; et, si vous m’en croyez, mon cher, mais trop malheureux mari,