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Rambouillet, une autre institution de politesse publique. Saint-Évremond y professa l’urbanité que respirent ses ouvrages. Le souvenir de cette influence étoit vivant encore dans le salon de Mme de Lambert, où le nom de notre auteur fut constamment si honoré. Quoique Mme de Lambert, née en 1647, eût à peine connu Saint-Évremond, elle conserva toujours une sorte de culte pour sa mémoire. Quelque parenté l’unissoit à la famille de Saint-Denis ; le marquis de Lambert, son beau-père, avoit fait glorieusement les campagnes de Flandre avec Saint-Évremond. Enfin l’esprit délicat de la marquise s’exerça sur des sujets où Saint-Évremond passoit pour maître. Elle s’appliqua aussi aux Portraits, dont le goût survécut à Mademoiselle. Celui que Saint-Évremond apporta, comme son contingent littéraire, chez Mlle de Montpensier, est sans contredit l’un des plus remarquables de la collection. Il ne porte pas le nom de Portrait, il porte le titre de Caractère ; et, en effet, ce n’est point une description de tête, de bras, ou de peau, qu’on y remarque : c’est un vrai Caractère, mais dans une acception plus spéciale que celle de la Bruyère ; et c’est la célèbre Mme d’Olonne qui en est l’objet. Elle n’avoit point encore été diffamée par Bussy. Sa passion romanesque pour le duc de Candale inspiroit même une complaisante indulgence. Sa beauté, son esprit original, le nom illustre de son époux la plaçoient aux premiers rang des plus grandes compagnies. Près d’elle figuroit aussi, au Luxembourg, Mme de Gouville, aux magnifiques cheveux : prude tendre, que Candale d’abord et Bussy plus tard ont livrée aux traits malins de la société parisienne.