Marion davantage. Mais l’époque explique tout, et l’on peut, à cette occasion, atténuer le reproche fait à d’autres. C’étoit le règne des partisans, des hommes de finance, enrichis souvent en quelques jours, à la face du public, par des opérations utiles à Richelieu, à Mazarin, qui, eux-mêmes, accumuloient des fortunes prodigieuses. La guerre enrichissoit ceux qui la dirigeoient ou qui la pourvoyoient. Tous ces hommes donnoient à pleines mains. La vie parisienne devenant chère et coûteuse, en se polissant, les dames qui recevoient l’argent des partisans ont cru reprendre le bien de tout le monde.
Et tout le monde, en effet, en a pris, sans distinction de rang. Une Rohan prenoit l’argent de Bullion ; la comtesse d’Olonne, prenoit l’argent de Jeannin de Castille et de Paget. Que devoient faire des femmes de moindre condition ? Peut-être, aussi, ces belles Athéniennes de Paris, en lisant leur Diogène de Laerte ou leur Menexène de Platon, avoient-elles remarqué que Socrate n’avoit pas trouvé mauvais qu’Aspasie dépensât avec grâce l’argent que Périclès donnoit avec générosité.
Voltaire a malheureusement autorisé de son témoignage et de ses cailletages, la fausse idée qui est restée de Ninon de Lenclos. Il a donné l’exemple de l’ingratitude et de la légèreté, envers cette femme excellente, dont la libéralité avoit honoré l’enfance du grand poëte, et dont la mémoire auroit dû trouver grâce auprès du vieux philosophe. Mieux placé que personne, en apparence, pour connoitre et proclamer la vérité, Voltaire n’a donné créance qu’aux mauvais bruits d’un autre temps. Il s’est trompé sur la naissance de Ninon ; il s’est trompé