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On peut retrouver dans la Fronde quelques traits qui rappellent la Ligue, mais son plus vrai caractère est celui d’une réaction contre le système de gouvernement personnifié dans Richelieu. Nous jugeons aujourd’hui ce grand politique à un autre point de vue que ses contemporains ; et ces derniers ont été loin de partager l’admiration, peut-être excessive, de la postérité, à son égard. La Rochefoucauld nous a laissé un jugement qui fut l’opinion générale de son temps : « Pendant douze années, Richelieu avoit violé toutes les lois du royaume…, renversé toutes les formes de la justice et des finances, etc. » Le cardinal de Retz nous dit la même chose, en d’autres termes : « Cet aspre et redoutable cardinal avoit foudroyé plutôt que gouverné les humains ; » et Gui Joly commence ainsi ses Mémoires : « Le ministère du cardinal de Richelieu étant devenu odieux, la nouvelle de sa mort fut reçue généralement dans toute la France avec des témoignages et des sentiments d’une joie qu’on ne peut assez exprimer. » Voilà l’impression véritable de l’époque, dans la plénitude de son erreur, mais aussi dans toute sa vérité.

Et, en effet, Richelieu sembloit avoir humilié les Parlements et abattu la féodalité, plutôt au profit de son pouvoir ministériel que du pouvoir royal. La grandeur et l’intérêt de sa lutte avec l’Autriche étoient effacés par ses vices. Il mourut, laissant un roi, moribond lui-même, qui avoit paru d’accord avec les peuples, pour le haïr, tout en lui abandonnant la puissance, et qui ne tarda pas à quitter la place à un roi de cinq ans, sous la régence d’une reine mère, naguère persécutée, outragée, comme