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prendre ses résolutions, et quoiqu’il les vît même ensemble, il ne les pesoit pas ensemble ; ainsi ce qui lui parut aujourd’hui plus léger, lui parut demain plus pesant. Voilà justement ce qui fit le changement de M. le Prince, sur lequel il faut confesser que ce qui n’a pas honoré sa vue, ou plutôt sa résolution, a bien justifié son intention. » Il convenoit an coadjuteur de justifier l’intention de Condé ; mais pour nous, qui, à deux siècles de distance, voyons un premier prince du sang livrer sa race aux hasards de la guerre civile, et son pays à l’étranger, la criminelle étourderie de sa révolte n’a point d’explication, si elle n’a pas l’ambition du trône pour mobile ; et il y a plus d’un témoin qui l’en accuse, avec l’opinion publique5. Voila les foiblesses du prince et de l’homme public. Celles de l’homme privé sont encore plus regrettables.

Je ne parlerai point des noirceurs dont Coligny le tient capable, devant Dieu et les saints évangiles6, bien qu’elles aient eu de l’écho chez les contemporains7. Il y a des imputations qu’il faut ignorer, ou ne pas croire. On voit d’autres misères dont l’humanité n’est pas défendue par la grandeur. L’histoire peut en négliger quelques-unes ; mais il est des imperfections historiques dont il faut faire état, pour l’instruction de la postérité. On ne peut tenir pour


5. Voy. les lettres de Guy Patin, édit. de M. Reveillé Parise, et les Mémoires de Coligny.

6. Voy. les Petits mémoires de Coligny-Saligny, édit. Monmerqué, p. xlviii et xlix.

7. Voy. la Correspondance de Mme la duchesse d’Orléans (la Palatine), publ. par M. Brunet, t. I, pag. 241.