Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vue et corrigée par Condé lui-même et dont M. Cousin a fait son profit3 avec habileté.

Il est probable qu’après la bataille, Saint-Évremond demeura, comme le prince victorieux, au camp de Flandres, et qu’il resta ainsi étranger aux événements que tout le monde connoît et qui se passèrent à Paris, après la nouvelle de la victoire : l’arrestation de Blancménil et de Broussel, l’insurrection des Parisiens, et tout ce qui suivit. Il ne rejoignit la cour qu’à la fin de l’hiver, après son voyage en Normandie. C’est dans cet intervalle qu’il a été disgracié auprès du grand Condé. Quelques détails, à ce sujet, sont nécessaires.

Il y a deux Condé qu’il ne faut pas confondre : celui de l’oraison funèbre, et celui de l’histoire. Tous deux héroïques, tous deux grands ; mais l’un taillé pour le panégyrique, l’autre pour la vérité. L’humble humanité se console quelquefois en se trouvant l’égale de la grandeur, par quelque point de misère. Bossuet et M. Cousin n’ont pas exagéré les qualités de Condé ; mais, pour avoir le vrai tout entier, il faut compléter le héros par l’homme ; l’ombre au tableau n’en affoiblit pas l’éclat. Qu’importé que Condé ait été bouillant, emporté, ombrageux, inexorable, et que les orages aient été fréquents autour de sa personne ; il n’en reste pas moins un incomparable personnage, et tout à fait digne des sympathies qu’il a inspirées. Il étoit sublime à la tête d’une armée ; écoutons ce récit d’une contemporaine, femme d’esprit et de cœur : « Dès


3. Voy. la Société française au dix-septième siècle, t. I, pag. 153, note.