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VII.

LETTRE AU MARQUIS DE CRÉQUI[1].
(1664[2].)

Après avoir vécu dans la contrainte des cours, je me console d’achever ma vie dans la liberté d’une république, où, s’il n’y a rien à espérer, il n’y a pour le moins rien à craindre. Quand on est jeune, il seroit honteux de ne pas entrer dans le monde, avec le dessein de faire sa fortune : quand nous sommes sur le retour, la nature nous rappelle à nous ; et revenus des sentiments de l’ambition au désir de notre repos, nous trouvons qu’il est doux de vivre dans un pays où les lois nous mettent à couvert des volontés des hommes, et où, pour être sûrs de tout, nous n’avons qu’à être sûrs de nous-mêmes.

Ajoutons à cette douceur, que les magistrats

  1. François, marquis de Créqui, maréchal de France en 1668 ; le même à qui Saint-Évremond a adressé d’autres ouvrages, et surtout la relation sur la paix des Pyrénées.
  2. Saint-Évremond écrivit cette lettre après avoir repassé d’Angleterre en Hollande.