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eut pas un qui ne se piquât de me servir. Il fut dit que j’irois demeurer au Palais Mazarin, et M. Mazarin à l’Arsenal ; qu’il me donnerait vingt mille francs de provision, et ce qui étoit plus important, qu’il produiroit les pièces par lesquelles je prétendois vérifier la dissipation qu’il avoit faite. Mme la princesse de Carignan me vint querir pour m’aller installer chez moi ; j’y trouvai tous les officiers qu’il me falloit, choisis par M. Mazarin ; mais je les remerciai fort civilement de leur bonne volonté. Mme la Comtesse, qui me piquoit toujours de générosité mal à propos, me persuada encore qu’il seroit vilain d’exiger la provision que le parlement m’avait accordée. M. Mazarin n’étoit pas homme à me la donner de bon gré. Cependant il falloit subsister. Elle me demandoit bien si j’avois besoin d’argent ; mais elle n’en pouvoit pas douter, et sans mes petites pierreries et mon frère, j’étois assez mal dans mes affaires. Il revint d’Italie dix jours après mon arrêt ; et quoiqu’il fût fort fâché du procès, par les mêmes raisons qui l’avoient fait désapprouver à M. Colbert, et qu’il m’eût toujours prédit que Mmela Comtesse m’abandonneroit après m’avoir embarquée, je trouvois tous les matins sur ma toilette plus d’argent qu’il ne m’en falloit, sans que je pusse jamais vérifier d’où il venoit.

Cependant M. Mazarin avoit porté notre affaire à la grand’chambre pour la faire juger au fond ; mais on fit en sorte que le Roi s’entremît de nouveau pour nous accommoder. Nous signâmes un écrit entre ses mains, qui portoit, que M. Mazarin reviendroit loger au Palais Mazarin, mais que j’aurois la liberté de choisir tous mes gens comme il me