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Monrose.

Oui.Si du moindre amour son cœur était épris,
Elle auroit supprimé cette lettre fatale,
Que, sans doute, elle a dû croire d’une rivale.

Aramont.

Une amante ordinaire eût commencé par-là.

Monrose.

C’est un malheur de moins. Mais laissons tout cela,
Et songeons à l’état de cette infortunée,
Que, je ne sçais comment, mon oncle a ruinée.
Je tenois tout de lui ; je n’avois presque rien…

Aramont.

Il est vrai.

Monrose.

Il est vrai.Jusqu’ici j’ai vécu sur son bien ;
J’ai, jusques à sa mort, surchargé sa dépense :
Ainsi j’ai partagé les dépouilles d’Hortence.
Il me seroit affreux de vivre à ses dépens.
Autant que je pourrai, je dois, & je prétends
Réparer, en secret, des pertes aussi grandes.
Il me reste une Terre ; il faut que tu la vendes.

Aramont.

Eh ! ne vous chargez point de semblables remords.
S’il falloit réparer les sotises des morts,
Ma foi, leurs héritiers n’y pourroient pas suffire,
Ce n’est pas votre faute : on n’a rien à vous dire.

Monrose.

L’honnête homme ne doit s’en rapporter qu’à lui :
Il se juge lui-même, & jamais par autrui :