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Lorsque je vais périr accablé sous la honte
Où m’a plongé l’accès d’une fureur trop prompte.

Damon.

Je vois à tes regrets…

Durval.

Je vois à tes regrets…Dis à mon désespoir.

Damon.

Mais au sort de Constance il est tems de pourvoir.

Durval, attendri, & les larmes aux yeux.

Que fait-elle à présent… Que faut-il que j’espere ?
Dis-moi… qu’est devenue une épouse si chere ?…
Ah ! je suis son bourreau plutôt que son époux.
Pourra-t-elle survivre à de si rudes coups ?
Sa blessure est mortelle, & j’en mourrai moi-même.

Damon.

Rien n’est désespéré dans ce malheur extrême.
Constance t’a sauvé la honte de l’éclat :
Elle en impose à tous, & cache son état ;
Son courage surpasse encor son infortune ;
Elle fait les honneurs d’une fête importune,
Dont elle ne croit pas être l’objet secret.
Il est vrai qu’en passant, mais sans être indiscret,
Je l’ai calmée un peu ; j’ai caché tout le reste.
Viens, un plus long délai lui deviendroit funeste.
Son courage est peut-être à son dernier effort.

Durval.

Cher ami, je te rends le maître de mon sort.
Sois mon unique appui, ma ressource auprès d’elle ;
Peins-lui mon désespoir. Ah ! quel que soit ton zele,