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Je n’ai qu’à me louer d’un heureux hymenée ;
Je ne méritois pas d’être si fortunée :
Mais enfin, si mon sort cessoit d’être aussi doux,
Si j’avois à pleurer le cœur de mon époux,
Je cacherois ma honte, en me rendant justice,
Et je me garderois d’augmenter mon supplice.
Un éclat indiscret ne fait qu’aliéner
Un cœur que la douceur auroit pû ramener.
Si quelque occasion peut mieux faire connoître,
Et sentir de quel prix une épouse peut être,
Si quelque épreuve sert à le mieux découvrir,
C’est lorsqu’elle est à plaindre, & qu’elle sçait souffrir.
Voilà mes sentimens, tirez la conséquence.

Argant.

On n’agit pas toujours aussi bien que l’on pense :
Un beau raisonnement ne détruit pas un fait.
Enfin, si vous voulez me convaincre en effet,
Concourez avec moi pour marier ma niéce ;
Ôtez-lui de l’esprit ce travers qui me blesse ;
Et que bientôt Damon…

Constance.

Et que bientôt Damon…C’est justement de quoi
J’avois à vous parler.

Argant.

J’avois à vous parler.Il me convient, à moi.

Constance.

Je n’imagine pas qu’il déplaise à Sophie.

Argant.

Ma niéce l’aimeroit ?