Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 1.djvu/172

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle ne sçavoit pas, ni vous non plus, Madame,
Que sans amour on peut très-bien aimer sa femme ;
Elle crut perdre au change ; elle dissimula,
Peut-être près d’un mois, après cet effort-là,
Il survint entre nous un terrible grabuge ;
Madame se plaignit, & mon pere en fut juge.
Le bonhomme autrefois fut dans le même cas.
Mon fils a tort, dit-il, je ne l’excuse pas.
Puisqu’il ne veut pas prendre un autre train de vie,
Je vois bien qu’il faudra que je me remarie…
Je répondrois de même, & j’irois en avant.

Constance.

Quand on croit deviner, on se trompe souvent.

Argant.

La contradiction me ravit & m’enchante…
Eh ! bien, Madame, soit ; vous êtes très-contente…
Oui… très-heureuse… très…

Constance.

Oui… très-heureuse… très…Monsieur, en doutez-vous ?

Argant.

Et vous dites par-tout du bien de votre époux…

Constance.

Puis-je faire autrement ?

Argant.

Puis-je faire autrement ?Et que le mariage
N’est pas toujours un triste & cruel esclavage…

Constance.

Je l’imagine.

Argant.

Je l’imagine.Et que… J’enrage de bon cœur…