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Votre époux a voulu que je gardasse encore,
Je peux fuir à jamais un époux qui m’abhorre.
De quel front à présent paroîtrois-je à ses yeux ?
Pourrois-je soutenir le reproche odieux
Dont il accableroit une épouse infidelle,
Que peut-être il voudroit retrouver criminelle ?

Orphise.

C’est la sujétion du sexe infortuné
De périr sous le joug quand il est enchaîné.
Abandonnez enfin le nom de Léonore.
La feinte vous rendroit plus criminelle encore.
Allez, Silvie, allez, retrouver votre époux.
Vous vous inspirerez des sentimens plus doux.
Aussi bien que l’amour, l’aversion s’épuise.
D’autre ressource enfin ne vous est plus permise.

Léonore.

On connoît son erreur sans pouvoir en guérir.
Adieu. Je pars, je fuis ; & je vais en mourir.



Scène X.

GERONTE, ORPHISE.
Geronte.

Léonore est en pleurs ? D’où vient qu’elle m’évite ?

Orphise.

C’est vous, Monsieur Geronte ? Où courez-vous si vîte ?