Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 1.djvu/115

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand vous refuseriez de vous rendre à mes vœux,
Nous ne romprons pas moins nos liens rigoureux.
Ma femme n’eut pour moi qu’une haine mortelle ;
C’est ce que vous avez de commun avec elle.

Léonore.

Dites-moi donc comment elle a pû vous haïr ?

Damon.

Vous me haïssez bien.

Léonore.

Vous me haïssez bien.Ah ! laissez-moi vous fuir.
Oublions-nous tous deux.

Damon.

Oublions-nous tous deux.Moi, que je vous oublie ?
Vous, sur qui je fondois le bonheur de ma vie,
Qui seule avez trouvé le secret d’enflammer
Un cœur que je croyois incapable d’aimer,
Dont vous allez causer l’éternelle souffrance !
Perd-on le souvenir, en perdant l’espérance ?
Ce n’est qu’en expirant d’amour & de douleur,
Que je puis oublier l’auteur de mon malheur.
Vous l’apprendrez bientôt ; c’est l’espoir qui me reste.

Léonore.

N’ajoutez pas encore à mon état funeste
Cet affreux désespoir.

Damon.

Cet affreux désespoir.C’est vous qui le causez.
Ces frivoles raisons que vous me proposez,