Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/86

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père lut la pièce, tantôt affectant de ne pas comprendre le sens, tantôt avec une emphase héroïque ; toujours avec le ton de cette mordante ironie qui irrite tant les nerfs d’un auteur :


Oh ! que n’ai-je la voix de ce cor merveilleux
Qui du héros mourant soupirait les adieux
Aux échos de Fontarabie,
Disant à Charlemagne au milieu de ses pairs
Comment à Roncevaux les Sarrasins pervers
De Roland avaient pris la vie !


« Les échos de Fontarabie ! dit mon père en s’interrompant ; la foire de Fontarabie, était ce qu’il fallait mettre… Sarrasins ! Qu’entendez-vous par Sarrasins ? ne pouviez-vous pas dire aussi bien païens, et parler votre langue, s’il faut que vous écriviez des sottises ?


Sur l’océan et sur la terre,
Et sur les rochers d’Angleterre
Quels accents rediront comment ce fier guerrier,
L’espoir de sa patrie et l’effroi de la France,
Le héros de Crécy, le vainqueur de Poitier,
À Bordeaux dans la tombe éteignit sa vaillance ?


Poitiers prend toujours un s, et je ne vois pas pourquoi vous violeriez l’orthographe pour la rime.


Écuyers, soutenez ma tôle languissante,
Dit-il, soulagez-la de mon casque d’airain,
Et que du soleil au déclin
Je puisse voir encor la splendeur bienfaisante,
Ô Garonne, éclairer ta rive florissante
Et ton onde au brillant destin !


Garonne et soleil n’ont jamais rimé ensemble. Comment, Frank, vous n’avez pas même étudié les règles du misérable métier que vous avez pris[1] ?


Avec moi le soleil au sommeil de la gloire
Succombe, et la rosée humecte sa mémoire,
Comme des pleurs versés par le chagrin.
Ainsi les tendres pleurs des vierges d’Angleterre
Couleront abondants, offrande tributaire,
Quand d’Édouard s’éteindra le destin.
Pourtant, de mon soleil bien que la gloire tombe,
La France et l’Angleterre, en regardant ma tombe,

  1. C’est au texte anglais que cette faute s’applique. a. m.