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entrant ; « mais le gîte est encore chaud, et les limiers ne peuvent tarder à les atteindre. »

Un cri parti du jardin m’annonça que sa prophétie ne se réalisait que trop bien. Au bout de quelques minutes, Rashleigh entra dans la bibliothèque, traînant sir Frédéric Vernon et sa fille, qu’il avait faits prisonniers.

« Le renard, dit-il, connaissait son ancien terrier ; mais il oubliait que le prudent chasseur était là pour en garder l’entrée. Je n’avais pas oublié la porte du jardin, sir Frédéric, ou, si ce titre vous plaît mieux, très-illustre lord Beauchamp.

— Rashleigh, s’écria sir Frédéric, tu es le plus abominable des scélérats !

— Je méritais ce nom, sire chevalier, ou milord, quand, égaré par les conseils d’un maître perfide, j’essayais d’allumer la guerre civile dans ma paisible patrie. Mais j’ai fait ce que j’ai pu pour réparer mes erreurs, » ajouta-t-il en élevant ses regards vers le ciel.

Je ne pus me contenir plus long-temps, malgré ma résolution de garder le silence : il fallait parler ou étouffer. « Ce que l’enfer, dis-je, peut produire de plus hideux, ce sont les traits de la scélératesse qui se couvre du voile de l’hypocrisie.

— Oh, oh ! mon gentil cousin, » dit Rashleigh en s’approchant avec une lumière et en m’examinant des pieds à la tête, « vous êtes le bienvenu à Osbaldistone. Je vous pardonne votre humeur. Il est dur de perdre en un jour un domaine et une maîtresse ; car nous allons prendre possession de ce château au nom de l’héritier légitime, sir Rashleigh Osbaldistone.

Pendant que Rashleigh parlait de ce ton ironique, je voyais combien il faisait d’efforts pour déguiser la colère et la honte qui l’agitaient. Mais son agitation devint encore plus évidente quand Diana Vernon lui dit :

« Rashleigh, j’ai pitié de vous ! Oui, quelque soit le mal que vous avez cherché et que vous avez enfin réussi à me faire, je ne puis vous haïr autant que je vous méprise. Ce que vous venez de faire est peut-être l’ouvrage d’une heure ; mais cette heure vous fournira un sujet de réflexions pendant toute votre vie… De quelle nature seront-elles ? c’est ce que votre conscience vous apprendra ; car vous n’étoufferez pas éternellement sa voix. »

Rashleigh fit deux ou trois tours dans la chambre, s’approcha d’une table sur laquelle j’avais laissé une bouteille de vin, et s’en