Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/466

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Comme la nuit commençait à obscurcir l’appartement, je vis André avancer la tête à la porte, non pour me demander si je voulais de la lumière, mais pour me recommander d’en prendre, comme mesure de précaution contre les esprits dont son imagination était effrayée. Je le renvoyai avec assez d’humeur, et m’asseyant dans l’un des fauteuils de cuir qui étaient au coin de la vieille cheminée gothique, je m’amusai à tisonner le feu. Tout en suivant des yeux le mouvement de la flamme que je venais d’alimenter. « Voilà, me disais-je, l’image des progrès et des résultats des désirs de l’homme ! Enfants de l’imagination, un rien les allume et les excite ; ils se nourrissent d’illusions et d’espoir, jusqu’à ce qu’ils aient consommé la substance qu’ils enflamment ; puis l’homme, ses passions, ses désirs, ses espérances, s’anéantissent à la fois, ne laissant plus qu’un vil amas de cendres ! »

Un profond soupir, qui partit du côté opposé de l’appartement, sembla répondre à ces réflexions. Je tressaillis de surprise et me levai précipitamment. Diana Vernon était devant moi ; elle s’appuyait sur le bras d’un homme qui ressemblait d’une manière si frappante au portrait dont j’ai déjà parlé, que je jetai les yeux sur le cadre, m’attendant presque à le trouver vide. Ma première idée fut que j’étais devenu fou, ou que je voyais deux esprits sortir de la tombe. Un second coup d’œil me convainquit que j’étais dans mon bon sens, et que les figures que je voyais étaient bien réellement deux substances corporelles. C’était Diana elle-même, quoique plus pâle et plus maigre qu’autrefois, accompagnée non d’un habitant de l’autre monde, mais du P. Vaughan, ou plutôt sir Frédéric Vernon, dans un costume tout à fait semblable à celui du portrait de son père, avec lequel il avait une grande ressemblance. Ce fut lui qui parla le premier ; car Diana tenait les yeux baissés vers la terre, et l’étonnement avait paralysé ma langue.

« Nous venons ici en suppliants, monsieur Osbaldistone, dit-il, réclamer le refuge et la protection de votre toit, jusqu’à ce que nous puissions poursuivre un voyage pendant lequel je risque à chaque pas de trouver les cachots ou la mort.

— Bien certainement articulai-je avec beaucoup de difficultés, miss Vernon ne peut croire… vous ne pouvez penser, monsieur, que j’aie oublié voire obligeante intervention dans une circonstance difficile, ou que je sois capable de trahir qui que ce soit, et vous moins que personne.

— Je le sais, dit sir Frédéric, et cependant c’est avec une répu-