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taient et dont la plupart étaient blessés. Environnés par des forces triples des leurs, privés de la faculté d’avancer ou de reculer, exposés à un feu meurtrier auquel ils pouvaient à peine répondre avec quelque succès, ils avaient mis bas les armes par ordre de leur officier qui avait senti qu’une plus longue résistance ne pouvait que faire perdre la vie à des braves, car la retraite était impossible. Protégés par leur position, les montagnards avaient acheté la victoire à peu de frais ; ils n’eurent qu’un homme tué, et deux furent blessés par les grenades. J’appris plus tard tous ces détails. Dans ce moment, je compris seulement le résultat de l’affaire, en voyant l’officier anglais, la figure couverte de sang, dépouillé de son chapeau et de ses armes, et ses hommes, dont les visages tristes et abattus exprimaient la rage et la honte, environnés d’une troupe de guerriers à demi sauvages qui faisaient subir aux vaincus toutes les conséquences des lois de la guerre.


CHAPITRE XXXI.

LA FEMME DU CHEF.


Malheur aux vaincus ! s’écriait le sauvage Brennus quand l’épée des Gaulois abattit l’orgueil de Rome. Malheur aux vaincus ! disait-il en jetant dans la balance le poids additionnel de son sabre massif. Et de nos jours encore, sur le champ de bataille, le malheur du vaincu n’a de bornes que dans la volonté du vainqueur.
La Gauliade.


Je cherchai à distinguer Dougal parmi les vainqueurs. Je ne doutais plus que le rôle qu’il avait joué ne fut préparé d’avance pour attirer l’officier anglais dans le défilé, et je ne pouvais m’empêcher d’admirer avec quelle adresse ce sauvage ignorant et en apparence si simple avait voilé son dessein, s’était laissé arracher comme par force les faux renseignements que son but était de donner. Je prévis qu’il y aurait du danger à s’approcher des vainqueurs dans la première chaleur d’un triomphe qui était terni par des actes de cruauté, car j’avais vu des montagnards, ou pour mieux dire des enfants qui se trouvaient parmi eux, poignarder