Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/369

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mée je prends la liberté de vous faire quelques observations. Ne pensez-vous pas que vous pourriez prendre un moment plus favorable pour vous enfoncer dans ce vallon ? Si vous cherchez Rob-Roy, tout le monde sait qu’il n’a jamais avec lui moins d’une cinquantaine d’hommes déterminés ; et s’il a pu rassembler les gens de Glengyle, de Glenfinlas et de Balquidder, il peut vous jouer un mauvais tour. Mon avis sincère, comme ami du roi, serait que vous feriez mieux de retourner au clachan car les vieilles femmes d’Aberfoïl sont comme les chouettes de mer, dont le glapissement lugubre est toujours suivi d’une tempête.

— Tranquillisez-vous, monsieur, répondit le capitaine Thornton. Je ne fais qu’exécuter mes ordres. Et puisque vous dites que vous êtes un ami du roi George, vous serez bien aise d’apprendre qu’il est impossible que cette bande de brigands, qui a si long-temps ravagé le pays avec impunité, échappe aux mesures qui sont prises en ce moment pour la détruire. L’escadron de milice commandé par le major Galbraith, qu’ont rejoint un ou deux autres détachements de cavalerie, occupe en ce moment les défilés inférieurs de ce pays sauvage ; trois cents montagnards, sous les ordres des deux gentilshommes que vous avez vus à l’auberge, se sont emparés des hauteurs, et différents corps de troupes de la garnison doivent garder les collines et les défilés dans toutes les directions. Les dernières nouvelles que nous avons reçues de Rob-Roy s’accordent avec l’aveu fait par cet homme que, se trouvant cerné de tous côtés, il a renvoyé le plus grand nombre de ses gens, dans le dessein de se cacher ou de parvenir à s’échapper, grâce à la connaissance parfaite qu’il a des passages.

— Je ne m’y fierais pas, dit le bailli… Il y avait ce matin plus d’eau-de-vie que de cervelle dans la tête de Garschattachin, et si j’étais à votre place, capitaine, je ne voudrais pas mettre ma principale confiance dans ces montagnards. Les faucons n’arrachent pas les yeux aux faucons. Ils peuvent bien se quereller entre eux, se dire des injures, peut-être même se donner quelques coups de sabre, mais ils finissent toujours par se réunir contre ceux qui portent des culottes et qui ont de l’argent dans leurs poches. »

Il paraît que cet avis ne fut pas tout à fait perdu. Le capitaine Thornton commanda à ses soldats de marcher en bon ordre, d’armer leurs mousquets et de mettre la baïonnette au bout du fusil. Il forma un avant-garde et une arrière-garde, composées chacune de deux soldats sous les ordres d’un sous-officier, et leur ordonna