Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/367

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Écossais ne sont pas un peuple qui accueille facilement les innovations, même quand elles tendent à améliorer leur sort[1].

Le bruit de notre départ donna l’éveil aux habitants de ces misérables demeures, et plus d’une vieille femme vint faire une reconnaissance sur la porte entr’ouverte de sa chaumière. En voyant ces sibylles avancer leurs têtes grises à peine couvertes d’une calotte de flanelle, et nous montrer leurs fronts ridés et leurs bras longs et décharnés, en les entendant marmotter entr’elles quelques paroles en gaélique, accompagnées de gestes bizarres, mon imagination me représenta les sorcières de Macbeth, et je crus lire sur les traits sinistres de ces vieilles toute la malice des trois Parques. Les petits enfants qui sortaient aussi des maisons, les uns tout à fait nus, les autres à moitié couverts de lambeaux de vieux plaids, frappaient dans leurs petites mains et faisaient des grimaces aux soldats anglais avec une expression de haine nationale et de malignité qui était au-dessus de leur âge. Je remarquai surtout qu’on ne voyait pas un homme, pas même un garçon de dix ou douze ans, parmi les habitants d’un village dont la population semblait forte en proportion de son étendue, et l’idée me vint que nous étions destinés à recevoir de leur part, dans le cours de notre excursion, des témoignages de malveillance plus effectifs encore que ceux qui se peignaient sur toutes les figures, et qui s’exprimaient par les murmures de ceux que nous voyions.

Ce ne fut que lorsque nous fûmes hors du village que ces gens se livrèrent à l’expression de toute leur haine. À peine l’arrière-garde avait-elle dépassé les dernières maisons pour prendre un petit sentier rompu formé par les traîneaux sur lesquels les habitants transportent leur tourbe, et qui conduisait dans les bois qui garnissent l’autre côté du lac, que nous entendîmes un bruit confus de voix de femmes dont les hurlements aigus se mêlaient aux cris des enfants et à des battements de mains dont les montagnards accompagnent toujours les exclamations que leur fait pousser la rage ou la douleur. Je demandai à André, qui était pâle comme la mort, ce que tout cela signifiait. « Je crains que nous ne le sachions que trop tôt, dit-il. Cela signifie que les femmes montagnardes poursuivent de leurs malédictions et de leurs impréca-

  1. Je ne sais comment ceci pourrait s’appliquer au temps de M. Osbaldistone ; mais je puis assurer le lecteur dont la curiosité le porterait à visiter les lieux de ces romanesques aventures, que le clachan d’Aberfoïl a maintenant une assez bonne petite auberge.