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mander réparation du tort qu’il avait fait à mon père, quoique j’ignorasse encore de quelle manière je pourrais l’obtenir. Toutefois je m’abandonnai au hasard, et, jetant en arrière le manteau qui m’enveloppait, je traversai la haie et me présentai soudainement devant Rashleigh, qui paraissait absorbé dans une profonde rêverie.

Rashleigh n’était pas homme à se laisser surprendre ni intimider par aucun événement soudain ; cependant il tressaillit en me voyant paraître tout à coup devant lui, le visage enflammé par l’indignation qui m’animait.

« Je suis bien aise de vous rencontrer, monsieur, lui dis-je ; car j’allais entreprendre, pour vous chercher, un long voyage, qui eût probablement été inutile.

— Vous connaissez mal celui que vous cherchez, dit Rashleigh avec son flegme ordinaire. Mes amis me trouvent facilement ; mes ennemis plus facilement encore. Votre abord m’oblige à vous demander dans laquelle de ces deux classes je dois ranger M. Francis Osbaldistone.

— Dans celle de vos ennemis, monsieur, répondis-je, de vos ennemis mortels, à moins que vous ne rendiez immédiatement justice à mon père, à votre bienfaiteur, en restituant ce que vous lui avez enlevé.

— Et à qui, moi, membre de la maison de commerce de votre père, monsieur Osbaldistone, suis-je tenu de rendre compte de mes transactions dans des affaires qui, sous tous les rapports, sont devenues les miennes ? Sûrement ce ne peut être à un jeune homme dont le goût exquis en littérature lui rendrait ces discussions fatigantes et inintelligibles.

— Ce sarcasme, monsieur, n’est pas une réponse ; je ne vous quitterai pas que vous ne m’ayez donné pleine et entière satisfaction. Vous allez me suivre chez un magistrat.

— Je vous suis. » Il fit quelques pas comme pour m’accompagner ; puis s’arrêtant, il reprit : « Si j’étais disposé à faire ce que vous désirez, vous sentiriez bientôt qui de nous deux a le plus lieu de craindre la présence d’un magistrat ; mais je n’ai nul désir d’accélérer votre destin… Allez, jeune homme ; amusez-vous de vos fantaisies poétiques, et laissez les affaires de la vie réelle à ceux qui les entendent et savent les diriger. »

Son intention, je pense, était de m’irriter encore davantage, et il y réussit. « Monsieur Osbaldistone, ce ton de froide insolence