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si vous voulez suivre mon conseil, nous partirons deux heures plus tôt. Je connais la route de nuit comme de jour, aussi bien que l’aveugle Ralph Bonaldson qui a parcouru tant de fois tous les coins du pays, quoiqu’il ne puisse distinguer la couleur d’un pâturage.

J’approuvai avec empressement l’amendement d’André à ma première proposition, et nous convînmes de nous trouver au lieu désigné à trois heures du matin. Cependant une réflexion soudaine se présenta à mon futur compagnon de voyage.

— Et le revenant, le revenant, dit-il, s’il venait à nous poursuivre ! Je ne m’accommoderais pas de voir chose semblable deux fois dans les vingt-quatre heures.

— Bah, bah ! m’écriai-je en m’éloignant, ne craignez rien de l’autre monde. Il y a dans celui-ci des démons vivants qui savent se suffire à eux-mêmes, et qui n’ont pas besoin des autres, quand toute la bande de Lucifer reviendrait ici pour les soutenir et les aider. »

En prononçant ces mots, qui m’étaient arrachés par la situation dans laquelle je me trouvais, je quittai l’habitation d’André et retournai au château.

Je fis le peu de préparatifs qui étaient nécessaires à mon voyage ; j’examinai et chargeai mes pistolets, puis me jetai sur mon lit pour donner quelques heures au sommeil et me préparer à supporter la fatigue et les inquiétudes du voyage que j’allais entreprendre. La nature, épuisée par les agitations tumultueuses de la journée, me fut plus propice que je ne l’espérais, et je jouis d’un sommeil profond et paisible, dont je sortis pourtant en sursaut au moment où la vieille horloge de la tourelle voisine de ma chambre sonnait deux heures. Je me levai sur-le-champ, me procurai de la lumière au moyen de mon briquet, et me mis à écrire la lettre que je destinais à mon oncle ; ceci fait, je mis dans ma valise les effets dont j’avais besoin, laissant derrière moi tout ce qui me parut trop embarrassant à emporter, et, descendant légèrement l’escalier, je gagnai l’écurie sans rencontrer d’obstacle. Sans être tout à fait aussi habile palefrenier qu’aucun de mes cousins, j’en avais assez appris à Osbaldistone-Hall pour savoir brider et seller un cheval ; de sorte qu’au bout de quelques minutes j’étais monté sur le mien, et prêt à commencer mon voyage.

En parcourant la vieille avenue sur laquelle la lune jetait une