Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/225

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précaution n’était pas indispensable. La bibliothèque m’était ouverte, comme à tous les habitants du château, à toutes les heures du jour et de la nuit, et je ne pouvais être accusé d’indiscrétion, quelque inopinément que j’y entrasse. Je croyais fortement que miss Vernon recevait quelquefois dans cette pièce le P. Vaughan, ou quelque autre personne sur les avis de laquelle elle était habituée à régler sa conduite, et qu’elle choisissait, pour ces entrevues, les instants où elle craignait le moins d’être interrompue. Les lumières que j’avais vues briller dans la bibliothèque, le passage de ces deux ombres que j’avais remarquées, les traces de pas d’homme que j’avais vues, un matin, de la porte de la tour à la poterne du jardin ; le bruit que quelques domestiques et André Fairservice, en particulier, avaient entendu : tout m’annonçait que cette pièce était visitée par quelque personne étrangère au château. Persuadé que cette personne avait de l’influence sur miss Vernon, je n’hésitai point à chercher les moyens de découvrir qui elle était, quels résultats bons ou mauvais son influence pouvait produire sur cette jeune fille ; surtout, bien que je cherchasse à me persuader que ce n’était là qu’une considération très-secondaire, je désirais savoir comment cette influence s’était établie et maintenue, si c’était celle de la crainte ou celle de l’affection. La preuve que cette curiosité jalouse était au comble, c’est que je m’étais toujours figuré que la conduite de Diana était dirigée par un seul homme, bien que, d’après ce que j’en savais, ses conseillers pussent être très-nombreux. Je m’étais souvent fait cette objection ; mais mon esprit n’avait jamais abandonné l’idée que la conduite de miss Vernon était dirigée par un seul être, par un homme, et probablement un homme jeune et bien fait ; et ce fut dans ce désir ardent de découvrir, ou plutôt de démasquer ce rival, que je me plaçai dans le jardin pour épier le moment où les lumières paraîtraient par les fenêtres de la bibliothèque.

Mon impatience était si dévorante, que, pour attendre un événement qui ne pouvait arriver avant la nuit close, je fus à mon poste une grande heure avant le coucher du soleil, par une soirée de juillet. C’était le jour du sabbat, et toutes les allées étaient tranquilles et désertes. Je me promenai quelque temps, jouissant de la fraîcheur d’une soirée d’été, et réfléchissant aux conséquences probables de mon entreprise. L’air frais et embaumé du jardin calma peu à peu mon sang agité ; le trouble de mon esprit