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Glenfruin, à l’extrémité sud-ouest du Loch-Lomond, dans le voisinage duquel les Mac-Gregor continuaient à exercer beaucoup d’autorité par le coir a glaive, ou le droit du plus fort, dont nous avons déjà parlé.

Une longue et sanglante rivalité exista entre les Mac-Gregor et le laird de Luss, chef de la famille de Colquhoun, race puissante de la partie basse du Loch-Lomond. La tradition des Mac-Gregor affirme que la querelle eut lieu pour un sujet bien frivole. Deux Mac-Gregor, surpris par la nuit, demandèrent l’hospitalité dans une maison appartenant à un vassal de Colquhoun ; ils furent refusés. Ils se réfugièrent sous un hangar, prirent un mouton dans la bergerie, le tuèrent, soupèrent avec, puis offrirent de le payer au propriétaire.

Le laird de Luss les fit saisir ; et d’après les moyens de procédure expéditive que les seigneurs féodaux avaient à leur disposition, il les condamna et les fit exécuter. Les Mac-Gregor citent à l’appui de ce récit un proverbe répandu parmi eux, qui maudit l’heure où « le mouton noir à la queue blanche fut mangé, mult dhu an carbail ghil. » Pour venger cet affront, le laird de Mac-Gregor assembla son clan, au nombre de trois ou quatre cents hommes, et marcha vers Luss, des bords du Lac, par un défilé appelé Raidna-gael, ou le Passage du montagnard.

Sir Humphrey de Colquhoun, bientôt instruit de cette incursion, rassembla une troupe deux fois plus nombreuse que celle des envahisseurs. Il avait avec lui des gentilshommes du nom de Buchanan, des Graham, d’autres petits nobles du comté de Lenpox, et un certain nombre de bourgeois de Dumbarton sous le commandement de Smolett, magistrat ou bailli de cette ville, un des ancêtres du célèbre auteur de ce nom.

Les deux petites armées se rencontrèrent dans la vallée de Glenfruin (la vallée des larmes), nom qui semblait pronostiquer l’issue de cette journée, qui, funeste aux vaincus, le fut tellement aussi aux vainqueurs, « que l’enfant à naître du clan d’Alpine eut lieu de s’en repentir. » Les Mac-Gregor, que la vue de forces supérieures aux leurs avait un peu découragés, se précipitèrent à l’attaque, rassurés par un seer ou devin doué de la seconde vue, qui affirma voir leurs principaux adversaires enveloppés de linceuls mortuaires. Le clan chargea avec furie le front de l’armée ennemie, pendant que John Mac-Gregor, avec un détachement nombreux, l’attaquait inopinément en flanc. La majeure partie