Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mon avis il n’y a plus de liberté chrétienne de laisser à la discrétion de l’âme affamée le soin de chercher son édification où elle la peut trouver, soit dans la bouche d’un prédicateur laïque qui ne reçoit sa mission que du ciel, soit dans les instructions de ceux qui ont été ordonnés prêtres et ont pris leurs degrés dans les synodes et les universités, qui ne sont au mieux que des associations de pauvres créatures sujettes comme eux au péché. — Vous parlez sans savoir ce que vous dites, monsieur, » répliqua Holdenough avec impatience ; « la lumière peut-elle sortir des ténèbres, l’instruction de l’ignorance, ou la connaissance des mystères de la religion de médecins sans expérience qui donnent des poisons pour des remèdes salutaires, et remplissent d’ordures l’estomac de ceux qui leur demandent de la nourriture ? »

À cette tirade, que le ministre presbytérien débita avec quelque chaleur, le général répondit avec la plus grande douceur.

« Là, là, là ! un savant homme, mais violent, un zèle excessif l’a dévoré… Oh ! comme il vous plaira, monsieur, vous pouvez parler de vos réguliers repas évangéliques, mais un mot dit à propos par un homme dont le cœur est comme le vôtre, lorsque vous montez à cheval pour aller à la rencontre des ennemis, ou quand vous montez à la brèche, est pour le pauvre esprit comme une grillade que l’affamé trouvera préférable à un repas splendide ; en de telles occasions l’âme rassasiée refuserait un rayon de miel. Néanmoins, quoique je parle aussi d’après mon faible jugement, je ne voudrais pas commander à la conscience de personne, je laisse à l’homme instruit la liberté de suivre l’homme instruit, et au sage celle de se laisser éclairer par le sage, pourvu toutefois qu’il ne soit pas permis de refuser à de pauvres âmes, simples et malheureuses, une gorgée de l’eau du ruisseau qui traverse le chemin. Oui, vraiment, ce sera un beau spectacle à voir en Angleterre, quand les hommes s’y conduiront comme dans un monde meilleur, soulageant entre eux leurs infirmités, se donnant les uns aux autres des consolations. Oui, vraiment, le riche boit dans des gobelets d’argent la liqueur qu’il se verse ; qu’il en soit toujours ainsi. »

Un officier ouvrit la porte et regarda dans l’appartement ; Cromvell, quittant le ton hypocrite et lent sur lequel il semblait devoir continuer, lui demanda brièvement et d’un air animé : « Pearson, est-il arrivé ? — Non, monsieur ; nous l’avons demandé à l’endroit que vous nous avez indiqué, et en d’autres lieux de la ville qu’il fréquente habituellement. — Le coquin ! » dit Cromwell avec em-