Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/216

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j’étudiais avec ardeur les Livres sacrés. Nous ne partagions pas la même opinion à l’égard de l’Église d’Angleterre, car il pensait comme les Arminiens, comme Laud et tous ceux qui voudraient mélanger nos établissements religieux et civils, et rendre l’église dépendante du souffle d’un homme terrestre. Enfin il favorisait l’épiscopat, tant pour ses doctrines que pour les cérémonies ; et quoique nous nous quittassions avec des larmes et des embrassements, ce fut pour suivre des routes bien différentes. Il obtint un bénéfice et devint fameux écrivain controversiste dans le sens des évêques et de la cour. Moi aussi, comme vous savez bien, tirant le meilleur parti possible de mes faibles talents, je taillai ma plume pour soutenir la cause du pauvre peuple opprimé, dont les consciences plus délicates rejetaient les rites et les cérémonies plus convenables au papisme qu’à une église réformée, et qui, d’après l’aveugle politique de la cour, étaient défendues par des peines et des châtiments. Alors vint la guerre civile, et moi, entraîné à cette époque par ma conscience, ne craignant, ne soupçonnant rien des tristes conséquences qui s’ensuivirent par l’insurrection de ces Indépendants, je consentis à contribuer, par mon crédit et mon zèle, au grand ouvrage en devenant chapelain du régiment du colonel Harrison ; non pas que je marchasse jamais à l’ennemi sur un champ de bataille, les armes à la main (puisque le ciel le défend à un ministre des autels) ; mais je prêchais, j’exhortais, et, au besoin, je guérissais les blessures d’un corps aussi bien que celles de l’âme. Or, il arriva, vers la fin de la guerre, qu’une bande de malveillants s’empara d’un château fort dans le comté de Shrewsbury, situé sur une petite île, s’avançant dans un lac, accessible seulement par une étroite chaussée ; de là ils faisaient des excursions et tourmentaient le pays. Il était donc bien temps de les réprimer, et un corps de notre régiment alla les réduire ; on me pria de faire partie de l’expédition, car nos soldats étaient en bien petit nombre pour attaquer une place si forte, et le colonel croyait que mes exhortations enflammeraient leur courage. Ainsi, contre mon habitude, je les accompagnai jusqu’au champ de bataille, où s’engagea une chaude action. Les malveillants, qui avaient leur artillerie placée derrière les murailles, avaient sur nous un si grand avantage, que, faisant briser leurs portes par une volée de coups de canon, le colonel Harrison commanda à ses hommes de s’avancer par la chaussée et d’essayer d’emporter la place d’assaut. Nos hommes se mirent vaillamment à l’ouvrage : ils s’avancèrent en