Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/113

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as été malveillant jadis, m’écrit mon digne ami le colonel Éverard ; mais tu as enfin abandonné cette cause perdue. Je te dis, l’ami, que tout ce qu’aurait pu faire le parlement ou l’armée n’eût jamais renversé les Stuarts de leur trône si le ciel ne les avait pas abandonnés. Ah ! il est bien doux, je dirai plus, bien glorieux de revêtir son armure pour la cause du ciel ! autrement, en vérité, cette famille serait encore aujourd’hui sur le trône d’Angleterre. Je ne blâme personne de les avoir défendus jusqu’à ce que les grands jugements successifs d’en haut les eussent accablés, eux et leur maison. Je ne suis pas sanguinaire, car je connais la fragilité humaine ; mais, l’ami, quiconque met la main à l’œuvre pour avancer le grand projet qui s’exécute dans ces trois royaumes doit bien prendre garde de regarder en arrière : car, comptez sur ma parole, si vous me trompez, je ne vous pendrai pas à une potence moins haute que celle qui servit pour Aman… Apprends-moi donc, d’un mot, si le levain de la malveillance est entièrement expulsé de ton âme. — Votre respectable Seigneurie, » répliqua le Cavalier en se frottant les épaules, nous a si bien étrillés presque tous, que la malveillance nous a bien vite quittés. — Crois-tu ? » dit le général avec un sourire refrogné sur les lèvres, qui semblait annoncer qu’il n’était pas tout-à-fait insensible à la flatterie. « Oui, vraiment ! en ceci tu ne mens pas, nous n’avons été que les instruments du ciel ; et, comme j’ai déjà voulu te le faire comprendre, nous ne nous sommes pas montrés aussi sévères envers ceux qui ont combattu contre nous comme malveillants, que bien d’autres auraient pu l’être à notre place. Le parlement connaît son intérêt et son bon plaisir ; mais, selon moi, il est bien temps de terminer ces dissensions, et de mettre tout le monde à même de contribuer à la prospérité de leur pays ; nous croyons d’ailleurs que ce sera ta faute si tu ne parviens pas à t’employer utilement pour l’État et pour toi-même, à condition que tu chasseras ce vieil homme, et que tu prêteras plus d’attention à ce que je vais te dire. — Votre Seigneurie peut être certaine de mon attention, » répliqua le Cavalier.

Et le général républicain, après une nouvelle pause, comme un homme qui ne donne pas sa confiance sans hésitation, se mit à expliquer ses projets avec une clarté qui ne lui était pas habituelle, mais non pas toutefois sans de temps à autre s’embrouiller encore dans sa longue habitude de circonlocutions, dont il ne se défaisait jamais complètement que sur un champ de bataille.

« Tu vois, mon ami, lui dit-il, où en sont mes affaires : le par-