Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/57

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d’ardeur et de dévouement. Mais à l’approche de l’armée des montagnards en 1745, il sembla que le zèle du digne baronnet s’était un peu modéré, et au moment même où son énergie pouvait devenir plus importante. Il parlait souvent, à la vérité, de s’armer en faveur des droits de l’Écosse et de Charles Stuart ; mais sa selle de guerre ne pouvait aller qu’à un de ses chevaux, et c’était précisément celui qu’on ne pouvait accoutumer à voir le feu. Peut-être l’honorable propriétaire n’était-il pas éloigné de partager les craintes de ce judicieux quadrupède, et commencait-il à penser qu’une chose aussi redoutée du cheval ne pouvait pas être très sûre pour le cavalier. Quoi qu’il en soit, tandis que sir Anthony Wardour parlait, buvait et restait incertain, le prévôt de Fairport, homme résolu et que nous avons déjà fait connaître comme le père de notre Antiquaire, sortit de son ancien bourg à la tête d’un corps de bourgeois whigs, et au nom de Georges II s’empara du château de Knockwinnock, des quatre chevaux de carrosse, et presque de la personne du propriétaire. Sir Anthony, bientôt après, fut envoyé à Londres en vertu d’un mandat du secrétaire d’État, avec son fils Arthur, alors jeune homme. Mais comme rien n’indiquait un acte de trahison ouverte, le père et le fils furent remis en liberté, et retournèrent à leur château de Knockwinnock pour boire plus que jamais à la santé de la famille exilée, et parler des souffrances qu’ils avaient endurées pour la cause de la famille royale. Ceci dégénéra tellement en habitude chez sir Arthur, que même après la mort de son père, le chapelain non-assermenté avait coutume de prier régulièrement pour la restauration du souverain légitime, la chute de l’usurpateur, et pour voir délivrer la famille de ses ennemis cruels et sanguinaires, quoique assurément toute pensée d’opposition sérieuse à la maison de Hanovre fût depuis long-temps évanouie, et que cette liturgie séditieuse fût plutôt conservée pour la forme que pour l’idée qu’on y attachait. Ceci était tellement vrai, que vers l’année 1770, à l’occasion d’une élection contestée qui eut lieu dans le comté, le digne chevalier prononça[1] les sermens d’abjuration et d’obéissance, afin de servir un candidat auquel il s’intéressait, abandonnant ainsi l’héritier pour la restauration duquel il implorait le ciel toutes les semaines, et reconnaissant l’usurpateur pour le détrônement duquel il ne cessait de prier. Et pour ajouter à ce triste exemple de l’inconséquence humaine, sir Arthur continua de prier en faveur de la maison de Stuart, même après l’extinction de la famille ; et quand,

  1. Gulped down, dit le texte, et littéralement avala. a. m.