CHAPITRE XXXV.
LE GRAND SEIGNEUR À MONKBARNS.
« Voyez un peu, monsieur Blattergowl, dit miss Griselda, quel homme est mon frère, pour un sage et un savant, de nous amener ce comte dans la maison sans en avoir dit un mot à personne !… le malheur arrivé à ces Mucklebackit fait que nous ne pouvons avoir de poisson… il était trop tard pour envoyer à Fairport chercher du bœuf, et le mouton est tout fraîchement tué ! Pour comble de bonheur, cette petite folle de Jenny Kintherout est tombée dans des attaques de nerfs, et n’a fait que rire et pleurer depuis deux jours ; de sorte qu’il faut que nous demandions à ce domestique étranger, qui est aussi grand et aussi grave que son maître lui-même, de se tenir au buffet pour servir. Je ne puis pas non plus aller dans la cuisine pour donner aucun ordre, car je le trouve toujours là allant et venant, et s’occupant de préparer quelque ragoût pour milord qui, à ce qu’il paraît, ne mange pas comme tout le monde non plus ; et puis, de quelle manière ferons-nous dîner ce domestique étranger ? En vérité, monsieur Blattergowl, je crois que la tête m’en tourne.
— Il est certain, miss Griselda, répliqua le ministre, que Monkbarns a agi sans réflexion… Il aurait dû choisir un jour pour cette invitation, comme on fait avec l’agrément du titulaire dans les transactions d’évaluation et de vente. Mais ce grand personnage ne pouvait tomber soudainement sur aucune maison de la paroisse qui fut mieux fournie de vivres… je dois en convenir, et l’odeur qui s’échappe de la cuisine flatte très agréablement mon odorat… Si vous avez quelques petites affaires de ménage, miss Griselda, ne me traitez pas en étranger ; je puis passer très bien mon temps avec la grande édition des Institutes d’Erskine. »