Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/213

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dans les cavités que leur offraient les rochers où sont les racines des vieux arbres dépouillés, s’étaient alors répandus sur la surface de la montagne pour prendre le repas du soir, s’appelant l’un l’autre par ce bêlement plaintif qui anime le paysage, et y répand en même temps une empreinte de solitude. Taffril et Lovel arrivèrent engagés dans une conversation sérieuse. Dans la crainte que leurs chevaux ne les fissent découvrir, ils les avaient renvoyés à la ville par le domestique du lieutenant. Leurs antagonistes n’étaient pas encore arrivés ; mais, en s’approchant du terrain, ils virent, assis sur les racines du vieux buisson d’épines, une figure aussi vigoureuse dans son déclin que les branches noueuses et couvertes de mousse qui ombrageaient sa tête. C’était le vieil Ochiltree. « Ceci est assez embarrassant, dit Lovel ; comment nous délivrerons-nous de ce vieux bonhomme ?

— Ici, père Édie, lui cria Taffril, qui connaissait le mendiant depuis long-temps. Voici une demi-couronne, il faut que vous alliez aux Quatre Fers à cheval, la petite auberge que vous connaissez là-bas ; vous demanderez si un domestique en livrée bleue et jaune n’y est pas arrivé ; s’il n’y est pas encore, vous l’attendrez, et vous lui direz que nous rejoindrons son maître dans à peu près une heure. Dans tous les cas, restez à l’auberge jusqu’à ce que nous revenions. Allons, allons, partez, levez l’ancre.

— Je vous remercie de votre aumône, dit Ochiltree mettant l’argent dans sa poche ; mais je vous prie de m’excuser, monsieur Taffril ; je ne puis faire votre commission en ce moment.

— Et pourquoi cela, bonhomme ? qui vous en empêche ?

— J’aurais un mot à dire au jeune M. Lovel.

— À moi ? demanda Lovel ; que voulez-vous me dire ? voyons, parlez, et soyez bref. »

Le mendiant, l’ayant conduit quelques pas à l’écart, lui dit : « Devez-vous quelque chose au laird de Monkbarns ?

— Si je lui dois ! Non vraiment. Pourquoi cela ? qui a pu vous le faire croire ?

— Il faut que vous sachiez que j’ai été aujourd’hui chez le shérif, car, Dieu merci, j’erre de tous côtés comme une âme en peine ; et qui ai-je vu arriver là tout affairé en chaise de poste, si ce n’est Monkbarns lui-même ; et l’on sait que cela n’est pas pour peu de chose que Son Honneur prendra une chaise de poste deux jours de suite.

— Eh bien, qu’est-ce que tout cela me fait ?