Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/192

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dans l’étroite vallée. Tout étonné qu’il fût de ce qu’il venait de voir, le premier soin de Martin en arrivant fut d’arranger au milieu de son bois le feu qu’il portait, de manière à rallumer le plus promptement possible son fourneau ; mais après bien des efforts, et après avoir vainement employé les secours du soufflet et des pincettes, le tison qu’il avait apporté du feu du démon s’éteignit entièrement sans avoir pu faire prendre le reste. Il se retourna, et vit les flammes continuer à briller sur la montagne, quoique les figures qui avaient gesticulé autour eussent disparu. Comme il pensa que le spectre s’était moqué de lui, il s’abandonna à la témérité naturelle à son caractère, et résolut de pousser l’aventure jusqu’au bout ; il reprit sa route vers l’endroit où était le feu, dont, sans aucune opposition de la part du démon, il rapporta de la même manière un morceau de bois embrasé, mais qui ne réussit pas mieux à allumer son feu que le précédent. L’impunité ayant mis le comble à son audace, il se détermina à faire une troisième tentative, et à approcher du feu comme les autres fois ; mais comme il s’en retournait après avoir pris un nouveau morceau de braise, il entendit la voix rauque et bizarre qui l’avait d’abord interrogé prononcer ces mots : « Garde-toi de revenir ici une quatrième fois. »

N’ayant pas mieux réussi à rallumer son feu cette fois que les autres, Martin renonça à cette inutile entreprise, et se jeta sur son lit de feuilles, résolu à remettre au lendemain matin la communication de cette aventure à ses frères. Il fut tiré du sommeil lourd où l’avaient jeté la fatigue du corps et l’agitation d’esprit qu’il avait éprouvées, par de violentes exclamations de surprise et de joie. Ses frères, étonnés de trouver le feu éteint en se levant, s’étaient mis à arranger le bois de manière à le renouveler, et avaient trouvé dans les cendres trois grosses masses de métal que leur savoir en ce genre (car les paysans de Hartz sont presque tous des minéralogistes praticiens) leur avait fait reconnaître pour de l’or pur.

Leur joie fut un peu troublée quand ils apprirent de Martin de quelle manière lui était venu ce trésor, d’autant plus que leur propre expérience de la nuit ne leur permettait pas de concevoir le moindre doute sur son récit ; mais ils n’eurent pas la force de résister à la tentation de partager les richesses de leur frère. Se mettant donc à la tête de la maison, Martin Waldeck acheta des terres et des bois, éleva un château, obtint des lettres de noblesse, et, à l’indignation de l’ancienne aristocratie du pays, fut investi de tous les privilèges d’une illustre naissance. Son courage dans les