CHAPITRE XIV.
RETOUR À MONKBARNS.
Le récit de la malheureuse entreprise de sir Arthur avait un peu détourné Oldbuck de questionner Lovel sur les motifs de sa résidence à Fairport. Il était cependant décidé à n’en pas laisser échapper l’occasion. « Miss Wardour vient de m’apprendre que vous la connaissiez déjà, monsieur Lovel. »
Lovel répondit « qu’il avait eu le plaisir de la voir chez madame Wilmot dans le comté d’York. »
— Vraiment ! vous ne m’aviez pas parlé de cela, et vous ne l’avez pas abordée chez moi comme une ancienne connaissance ?
— Jusqu’au moment où vous me présentâtes, dit Lovel fort embarrassé, j’ignorais que ce fût la même personne, et mon devoir, en ce cas, était d’attendre qu’elle me reconnût la première.
— Je conçois votre délicatesse. Le chevalier est un vieux fou pointilleux ; mais je vous assure que sa fille est au dessus de tous ces ridicules préjugés. Et maintenant que vous avez rencontré ici de nouveaux amis, puis-je vous demander si vous avez l’intention de quitter Fairport aussitôt que vous vous le proposiez ?
— Que diriez-vous, si je répondais à votre question par une autre, reprit Lovel, et si je vous demandais quelle est votre opinion sur les rêves ?
— Les rêves, jeune fou ! que voulez-vous que j’en pense, si ce n’est que ce sont les écarts de l’imagination, quand la raison a lâché les rênes ? Je ne connais d’autre différence entre eux et les aberrations de la folie. Dans les deux cas, les chevaux, abandonnés à eux-mêmes, emportent la voiture en fuyant ; seulement dans l’un le cocher est ivre, tandis que dans l’autre il ne fait que sommeiller.