Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/54

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prétendent que c’est parce que je laissais Davie Mac-Guffog, le constable, décerner les mandats, et conduire les affaires à son gré, comme si j’étais un homme de cire : mais c’est une pure calomnie, car je n’ai décerné que sept mandats dans ma vie, et c’est Dominie qui les a tous écrits ; et si ce n’avait été cette malheureuse affaire de Sandy Mac-Gruthar’s que les constables gardèrent deux ou trois jours dans le vieux château là-bas sur la hauteur, au lieu de l’envoyer dans la prison du comté, ce qu’il était juste de faire : cela m’a coûté assez d’argent. Mais je sais bien ce que cherche sir Thomas Kittlecourt, il voudrait bien me placer dans l’église de Kilmagirdle, comme si je n’avais pas plus de droits à être sur le devant de la galerie en face du ministre, que Mac-Crosskie de Creochstone, le fils de Deacon Mac-Crosskie, le tisserand de Dumfries ? »

Mannering reconnut la justice de toutes ces plaintes.

« Eh ! monsieur Mannering, il y eut encore une histoire au sujet de la route et du fossé du parc à moutons. Je savais que sir Thomas était derrière tout cela, et je dis clairement au clerc des arbitres que je voyais le pied fourchu[1], et qu’ils le prissent comme ils le voudraient. Un gentleman ou plusieurs gentlemen auraient-ils voulu établir et faire passer une route à travers le fossé d’un parc, et perdre ainsi, comme un agent le leur fit observer, deux roods de bon pâturage de bruyère ? Et il y a aussi l’histoire sur le choix du collecteur des taxes. — Certainement, monsieur, il est extraordinaire que l’on ait pour vous si peu d’égards dans un pays où, si l’on en juge par l’étendue de leur château, vos ancêtres ont dû jouer un rôle important. — Cela est vrai, monsieur Mannering ; je suis un homme simple et je ne fais pas attention à toutes choses ; et je dois même vous dire que je ne les retiens pas aisément dans ma mémoire ; mais je voudrais que vous eussiez entendu mon père raconter les combats de nos ancêtres les Mac-Dingawaies, qui sont les Bertram d’aujourd’hui, avec les Irlandais et les Highlandais qui vinrent d’Ilay et de Cantyre dans leurs berlings[2] ; comme ils allèrent à la Terre-Sainte, c’est-à-dire à Jérusalem et à Jéricho, avec leurs clans qui les suivaient ; ils auraient mieux fait d’aller à la Jamaïque, comme l’oncle de sir Thomas Kittlecourt ; et comme ils ont rapporté des reliques semblables à celles des catholiques, et un drapeau qui est en haut dans le grenier. S’il se fût agi de tonneaux de vin muscat ou de poinçons de rum, le domaine vaudrait mieux

  1. Le diable. a. m.
  2. Galères à demi pontées dont il est parlé dans la Légende de Montrose. a. m.