Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/318

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

raison dont Bertram venait de se servir. Les veines de son cou et de ses tempes étaient gonflées à se rompre ; il avait l’air furieux et déconcerté d’un homme qui a reçu une mortelle injure, mais qui croirait en y répondant s’abaisser et s’avilir. Tandis que, les sourcils froncés, les yeux rouges de colère, il reprenait haleine lentement et avec dignité, ne respirant qu’avec une peine infinie, Glossin vint à son secours. « Avec votre permission, sir Robert, il me semble qu’en voilà bien assez. Un des constables, outre les preuves évidentes déjà produites, offre d’assurer par serment que l’arme qu’on a retirée ce matin des mains du prisonnier, et dont, soit dit en passant, il se servait pour résister à un mandat légal, a été perdue par lui dans un combat livré par les officiers de la douane contre les contrebandiers, un peu avant l’attaque de Woodbourne. Cependant, ajouta-t-il, je ne voudrais pas vous voir tirer de ceci des conséquences trop rigoureuses. Peut-être le prisonnier pourra-t-il nous dire comment il se trouvait porteur de cette arme. — C’est encore une question à laquelle je ne répondrai pas. — Toujours avec la permission de sir Robert, continua Glossin d’un ton doucereux, il nous faut encore des explications sur un autre sujet. Le prisonnier a remis entre les mains de mistress Mac-Candlish, l’aubergiste de Kippletringan, une bourse renfermant différentes monnaies d’or, et des objets précieux de tout genre. Peut-être jugerez-vous convenable, sir Robert, de demander à monsieur d’où lui vient un trésor si singulièrement composé. — Monsieur Van Beest Brown, vous entendez, monsieur, la question qu’on vous adresse ? — J’ai des raisons particulières pour refuser d’y répondre. — Alors, monsieur, j’en suis fâché, dit Glossin, qui en était venu où il voulait arriver, notre devoir nous oblige à signer un mandat pour qu’on vous mène en prison. — Comme il vous plaira, monsieur ; toutefois, prenez garde à ce que vous allez faire. Songez que je vous déclare ma qualité de capitaine dans un régiment au service de Sa Majesté…, que j’arrive tout récemment des Indes, et qu’ainsi je ne peux avoir aucune liaison avec les contrebandiers dont vous parlez. Mon lieutenant-colonel est en ce moment à Nottingham, et le major de mon régiment, avec tous les officiers, à Kingstone-upon-Thames[1]. Je consens à être traité comme un infâme si, par le retour de la poste de Kingstone et de Nottingham, je ne puis fournir les preuves les plus positives de mes assertions. Si vous le préférez, écrivez au payeur du régiment, et… — Tout cela est fort bien, monsieur, »

  1. Kingston sur la Tamise. a. m.