Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/26

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un hurlement plaintif, il est probable que ce ne fut pas seulement la force des poumons de son adversaire qui décida la victoire.

« Malédiction sur ta gueule ! tels furent les premiers mots articulés ; ne me laisseras-tu pas savoir ce qu’on veut, avec tes hurlements ? — Suis-je loin de Kippletringan, bonne femme ? — De Kippletringan !!! » répéta la bonne femme d’un ton de surprise, et que nous ne pouvons bien rendre que par trois points d’admiration. « Eh, l’homme ! vous auriez dû prendre par l’est pour aller à Kipplelringan ; maintenant il faut retourner sur vos pas jusqu’au whaap[1], et suivre le whaap jusqu’à ce que vous soyez à Ballenloan, et alors… — Cela est impossible, bonne femme ; mon cheval est presque mort de fatigue. Ne pourriez-vous pas me donner à loger pour une nuit ? — En vérité, je ne le puis ; je suis seule : car James est allé à la foire de Drumshourloch avec les moutons de l’année, et pour ma vie je n’oserais ouvrir la porte à des coureurs de nuit de votre espèce. — Mais que dois-je donc faire, bonne femme ? car je ne puis pas dormir sur la route toute la nuit. — En vérité, je n’en sais rien, à moins que vous ne vouliez descendre à la Place, et demander un logement pour cette nuit ; je vous assure qu’on vous y recevra, que vous soyez un gentilhomme ou un roturier. — Oui, simple assez en effet pour errer à une telle heure de la nuit, » pensa Mannering, qui ignorait le sens de la phrase. « Mais comment irai-je à la Place, ainsi que vous l’appelez ? — Vous prendrez à l’ouest au bout du loan[2] ; et vous ferez attention à la mare. — Oh ! si vous me parlez encore d’est et d’ouest, je suis perdu. Est-ce qu’il n’y aurait personne pour me conduire à cette Place ? je le paierais généreusement. »

Ce mot payer opéra comme un talisman. « Jack, paresseux ! cria la voix de l’intérieur, avez-vous là pris racine, quand un jeune gentleman cherche le chemin de la Place ? Debout ! allons, coquin ! et montrez-lui le chemin par le bas du loaning[3]. — Il vous montrera le chemin, monsieur, et je vous jure que vous serez bien reçu, car jamais on n’a refusé la porte à personne ; et vous arriverez dans un moment opportun, je pense, car le domestique du laird, pour ne pas dire son valet-de-chambre, mais celui qui l’aide comme… vient de passer à cheval pour aller chercher la sage-femme, et il

  1. Le Hope, souvent prononcé Waap, est le creux ou la partie abritée d’une colline. Hoff, howff, hoaf et haven sont des modifications du même mot. a. m.
  2. Lieu où l’on trait les vaches. a. m.
  3. Même signification que loan. a. m.