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comtes de Shrewsbury, auxquels votre famille est sans doute alliée. »

« Je crois, répondit le colonel en souriant, que nos chiens ont été mis bas sur la même litière. Pour ma part, si les armoiries devaient se disputer la préséance, je leur dirais comme dit le proverbe : À bon chien bon ours. »

Pendant qu’il parlait ainsi, et que le baron prenait encore une prise de tabac, ils étaient entrés dans la maison, c’est-à-dire, le baron, lady Émilie avec le jeune Stanley et le bailli, car Édouard et le reste de la compagnie restaient sur la terrasse pour examiner une nouvelle serre, construite avec un goût parfait. Le baron en revint à son sujet favori. « Quoiqu’il vous ait pris fantaisie, colonel, de renoncer à l’honneur de votre écusson, ce qui est un caprice qui vous est commun avec beaucoup de gentilshommes de votre pays, distingués par leur naissance et leur rang, je vous répéterai encore une fois que vos armoiries sont fort anciennes et trop recommandables, comme celles de mon jeune ami Stanley, qui sont un aigle et un enfant.

« L’oiseau et le poupon, comme on dit dans le Derbyshire, » ajouta Stanley.

« Vous êtes un mauvais plaisant, répliqua le baron, qui avait beaucoup d’affection pour ce jeune homme, peut-être parce qu’il le contrariait de temps en temps ; vous êtes un mauvais plaisant, et quelque jour je vous corrigerai, ajouta-t-il en lui montrant le poing. Ce que je voulais vous dire, colonel Talbot, c’est que votre prosapia, c’est-à-dire votre race, est ancienne ; et puisque vous avez équitablement et légalement acquis ce domaine pour vous et les vôtres, comme je l’ai perdu pour moi et les miens, je souhaite qu’il reste dans votre famille autant de siècles qu’il est resté dans celle des anciens propriétaires. »

« C’est un souhait fort généreux, monsieur Bradwardine, » répondit le colonel. — « Je ne puis m’empêcher d’admirer que vous, colonel, en qui je remarquai à Édimbourg un amor patriœ[1] si exalté qu’il vous rendait injuste envers les autres pays, vous ayez pu vous décider à laisser vos dieux domestiques, procul a patriœ finibus[2], de manière à vous expatrier en quelque sorte. » — « En vérité, baron, je ne sais pourquoi, afin de garder le secret de ces jeunes fous, Stanley et Waverley, et de ma femme, qui n’est

  1. Amour de la patrie. a. m.
  2. Loin des frontières de la patrie. a. m.