Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/487

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cruelle consolation de baiser les lèvres glacées de mon cher… de mon cher Fergus. »

L’infortunée Flora, après deux ou trois gémissements convulsifs, s’évanouit. La dame, qui était restée dans l’antichambre, entra sur-le-champ, et pria Édouard de quitter l’appartement, mais de ne pas sortir de la maison.

Après environ une demi-heure on l’appela. Il s’aperçut que, par un violent effort, miss Mac-Ivor avait repris un grand sang-froid. Ce fut alors qu’il se hasarda à la presser de regarder miss Bradwardine comme une sœur adoptive, et d’accepter son assistance et sa protection pour l’avenir.

« J’ai reçu, répliqua-t-elle, une lettre de ma chère Rose, qui me parle dans le même sens. Le chagrin ne s’occupe que de lui-même, il est égoïste : autrement j’aurais répondu que, même dans mon désespoir, j’avais ressenti un mouvement de joie en apprenant ses espérances de bonheur, et que le vieux baron avait échappé au naufrage universel. Donnez ceci à ma chère Rose ; c’est le seul bijou de prix de la pauvre Flora, et il a été porté par une princesse. » Elle lui mit dans la main un écrin qui renfermait la chaîne de diamants dont elle avait coutume d’orner sa chevelure. « Il me serait inutile à l’avenir. La bienveillance de mes amis m’a trouvé une retraite dans le couvent des Bénédictines écossaises à Paris. Si je survis à la journée de demain, je me mettrai en route avec cette vénérable sœur. Et maintenant, monsieur Waverley, adieu. Puissiez-vous être heureux avec Rose autant que vos aimables qualités le méritent ; et pensez quelquefois aux amis que vous avez perdus. N’essayez pas de me revoir : ce serait une preuve d’amitié, mais qui m’affligerait. »

Elle lui tendit la main, sur laquelle Édouard répandit un torrent de larmes, et d’un pas chancelant il sortit de l’appartement, et retourna à Carliste. À l’auberge, il trouva une lettre de son ami le solliciteur ; elle lui annonçait que le lendemain matin il pourrait voir Fergus aussitôt que les portes du château s’ouvriraient, et qu’il aurait la liberté de rester avec lui jusqu’au moment où le shérif donnerait le signal du départ pour le lieu du supplice.