Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/485

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avoir tremblé au milieu de si cruelles angoisses. « Miss Flora Mac-Ivor, portait la lettre, ne peut se refuser à recevoir le plus cher ami de son frère, même en ce moment où elle est livrée à une douleur qui n’eut jamais d’égale. »

Quand Édouard se présenta dans la maison où résidait momentanément miss Flora, il fut admis sur-le-champ. Dans un vaste et sombre appartement, tendu en tapisseries, Flora était assise auprès d’une fenêtre dont les jalousies étaient fermées, occupée à coudre une espèce de vêtement de flanelle blanche. À quelque distance était une femme âgée, étrangère, à en juger par l’apparence, et appartenant à un ordre religieux ; elle lisait tout haut des prières dans un livre de dévotion catholique ; mais quand Waverley entra, elle le posa sur la table et sortit. Flora se leva pour le recevoir, lui tendit la main ; mais elle n’essaya pas de parler. Sa beauté n’existait plus ; elle était extrêmement maigre ; sa figure et ses mains blanches comme le marbre le plus pur, ressortaient d’une manière frappante à côté de ses habits de deuil et de ses cheveux noirs comme le jais ; cependant, au milieu de cet appareil lugubre, rien sur sa personne n’était en désordre ou négligé. Sa chevelure même, quoique sans aucun ornement, était arrangée avec le soin et l’élégance ordinaires. Les premiers mots qu’elle prononça furent : « L’avez-vous vu ? »

« Hélas ! non, répondit Waverley : on m’a refusé de me laisser entrer. »

« Cela s’accorde avec le reste, dit-elle ; mais il faut nous soumettre. Espérez-vous obtenir la permission ? »

« Pour… pour demain, » répondit Waverley. Mais il murmura ces derniers mots d’une voix si faible qu’elle était à peine intelligible.

« Oui, alors ou jamais, dit Flora, jusque, ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel, jusqu’au moment où j’espère que nous nous réunirons tous. Mais j’espère que vous le verrez avant qu’il quitte ce monde. Il vous a toujours aimé du fond de son cœur, quoique… ; mais il est inutile de parler du passé. »

« Inutile ! » répéta Waverley.

« Et même de parler de l’avenir, mon bon ami, ajouta Flora, en ce qui concerne les événements terrestres. Combien de fois me suis-je représenté comme possible cette horrible fin, et me suis-je exercée à la souffrir en ce qui me regardait ! mais que tous mes pressentiments étaient au-dessous de l’amertume inexprimable de